Résumé - 27 mai 2004. Les astronomes
peuvent mesurer la réflectivité de l'atmosphère
de la terre en regardant la "brillance de la terre"
sur la lune. Ils ont trouvé qu'une atténuation
graduelle de cette lumière terrestre réfléchit
sur la lune correspond au réchauffement de l'atmosphère
basse de la planète durant les deux dernières
décennies. La possibilité que la couverture
nuageuse réduite puisse causer un changement
de climat est toujours controversée, et beaucoup
de scientifiques sont sceptiques sur ces nouvelles recherches.
De façon intéressante, les astronomes
qui ont produit cette étude récente ont
trouvé que la
tendance s'était inversée, la brillance
de la terre recommençant à augmenter.
Les scientifiques qui surveillent la réflectivité
de la terre en mesurant sa "brillance" sur
la lune ont observé de grandes variations climatiques
inattendues pendant les deux dernières décennies.
En combinant huit années de données avec
presque vingt ans de données satellites qui se
chevauchent partiellement, ils ont trouvé un
déclin graduel de la réflectivité
de la terre qui est devenu plus net dans la dernière
partie des années 90, peut être associé
avec l'accélération du réchauffement
global des dernières années. De façon
surprenante, la réflectivité
déclinante s'est complètement inversée
ces trois dernières années. De
tels changements, qui ne sont pas compris, semblent
être dus à la variabilité naturelle
des nuages terrestres.
L'édition du 28 mai 2004 du journal "Science"
examine le phénomène dans un article,
"Changement de la réflectivité de
la terre pendant les deux dernières décennies",
écrit par Enric Palle, Philip R. Goode, Pilar
Montaes Rodriguez et Steven E. Koonin. Goode est un
éminent professeur de physique à l'Institut
de Technologie du New Jersey (ITNJ), Pale et Montaes
sont des associés d'après-doctorat dans
cette institution, et Koonin est professeur de physique
théorique à l'Institut de Technologie
de Californie. Les observations ont été
conduites à l'observatoire solaire Big Bear en
Californie, où l'ITNJ a opéré depuis
1997 avec Goode comme directeur. La NASA a financé
ces observations.
L'équipe a repris et modernisé une vieille
méthode pour déterminer la réflectivité
de la terre, ou albédo, en observant la brillance
de la terre, la lumière solaire réfléchit
par la terre qui peut être vue comme une lueur
fantomatique du côté sombre de la lune
- la portion du disque lunaire non éclairée
par le soleil. Comme Koonin l'a réalisé
il y a quatorze ans, de telles observations peuvent
être un outil puissant pour la surveillance du
climat à long terme. "Plus la terre est
nuageuse, plus la réflectivité est grande,
et le changement de la couverture nuageuse est un élément
important du changement de climat" a-t-il déclaré.
Des observations précises de la brillance de
la terre pour déterminer la réflectivité
globale ont lieu à l'observatoire Big Bear depuis
1994, les observations régulières commençant
fin 1997.
"Utilisant un phénomène expliqué
pour la première fois par Léonard de Vinvi,
nous pouvons précisément mesurer le changement
du climat global et trouver une évolution surprenante
des nuages. Notre méthode a l'avantage d'être
très précise parce que le croissant lunaire
brillant sert de standard pour contrôler la brillance
de la terre, et la lumière réfléchit
par de larges portions de la terre peut être observée
simultanément", dit Goode. "C'est aussi
peu coûteux, nécessitant seulement un petit
télescope et un détecteur électronique
relativement simple".
En utilisant une combinaison d'observations de la brillance
de la terre et de données satellite de la couverture
nuageuse, l'équipe a déterminé
ceci:
L'albédo moyen de la terre n'est pas constant
d'une année à l'autre; il change aussi
sur une échelle décennale. Les modèles
informatiques actuellement utilisés pour étudier
le système climatique ne montrent pas une telle
variabilité de l'albédo à l'échelle
décennale.
La moyenne annuelle de l'albédo a décliné
très graduellement de 1985 à 1995, puis
nettement en 1995 et 1996. Ces déclins observés
sont globalement consistants avec les mesures satellite
de la quantité de nuages précédemment
connue.
Le faible albédo pendant la période 1997-2001
a augmenté le réchauffement du globe dû
au soleil à un rythme presque double de celui
attendu pour un doublement du dioxyde de carbone atmosphérique.
Le "ternissement" de la terre, comme il pourrait
être vu depuis l'espace, est peut être connecté
à l'augmentation accélérée
récente des températures de surface globales
moyennes.
Les années 2001-2003 ont vu une inversion de
l'albédo aux niveaux d'avant 1995; cet "éclaircissement"
de la terre est le plus probablement imputable à
l'effet de l'augmentation de la couverture nuageuse
et à son épaisseur.
Ces grandes variations, qui sont comparables à
celles des radiations terrestres infrarouges (chaleur)
observées aux tropiques par les satellites, ont
une grosse influence sur le budget radiatif terrestre.
"Nos résultats sont seulement une partie
de l'histoire, parce que la température de surface
de la terre est déterminée par un équilibre
entre la lumière solaire qui réchauffe
la planète et la chaleur re-rayonnée dans
l'espace, qui la refroidit" dit Palle. "Ça
dépend de beaucoup de facteurs en plus de l'albédo,
tels que la quantité de gaz à effet de
serre (vapeur d'eau, dioxyde de carbone, méthane)
présente dans l'atmosphère. Mais ces nouvelles
données soulignent que les nuages doivent être
correctement pris en compte et illustrent qu'il nous
manque encore la compréhension détaillée
de notre système climatique, nécessaire
pour modéliser les changements futurs avec assurance".
Goode dit que les observations de la brillance de la
terre vont continuer pendant la prochaine décennie.
"Ce sera important pour surveiller les changements
continuels du système climatique. Ce sera aussi
essentiel pour mettre en corrélation nos résultats
avec les données satellites qui seront disponibles,
particulièrement pour ces dernières années,
pour constituer une description consistante du changement
de l'albédo. Les observations de la brillance
sur un cycle solaire de 11 ans seront aussi importantes
pour évaluer l'influence hypothétique
de l'activité solaire sur le climat."
Montaes Rodriguez dit que pour effectuer les observations
futures, l'équipe travaille à établir
un réseau global de stations d'observation. "Elles
permettraient une surveillance continue de l'albédo
pendant une grande partie du mois lunaire et compenseraient
aussi les conditions climatiques locales qui empêchent
de temps en temps les observations sur un site donné".
Les observations de l'observatoire solaire Big Bear
sont actuellement complétées avec d'autres
de Crimée en Ukraine, et il y aura bientôt
des observations de Yunnan en Chine. Une amélioration
supplémentaire sera d'automatiser entièrement
les observations manuelles actuelles. Un prototype de
télescope robotisé est en construction
et l'équipe cherche un financement pour construire,
calibrer et déployer un réseau de huit
télescopes autour du globe.
"Alors que la communauté scientifique reconnaît
la probabilité de l'impact humain sur le climat,
elle doit mieux documenter et comprendre les changements
climatiques", dit Koonin. "Nos mesures continuelles
de la brillance seront une partie importante de ce processus." |