En rayonnant plus de lumière solaire dans
l'espace nous pourrions acheter du temps pour régler
le problème du réchauffement global, écrit
Kate Ravilious.
La terre semble être sur le point de surchauffer.
Les températures augmentent, les calottes glaciaires
fondent et tout indique que ce qui nous attend est une
serre. Mais qu'en est il si nous pouvions réduire
la température de la planète? Est ce que
ça nous donnerait du temps pour nous sevrer des
combustibles fossiles et trouver des sources alternatives
d'énergie?
C'est ce qu'un groupe de physiciens de l'atmosphère
éminents et un ingénieur proposent, et
ils ont eu l'idée d'arrêter le réchauffement
de la terre. N'utilisant rien de plus que de l'eau salée
et la puissance du vent, ils ont conçu un appareil
qui augmentera la réflectivité de certains
des nuages, renvoyant plus de lumière solaire
dans l'espace. Ils prétendent que ce bouclier
naturel contre la chaleur pourrait être mis en
marche et arrêté à volonté,
nous donnant quelques décennies supplémentaires
vitales pour nous sortir de la situation catastrophique
dans laquelle nous nous trouvons.
John Latham, un physicien de l'atmosphère basé
au Centre National pour la Recherche Atmosphérique
au Colorado, a le premier trouvé l'idée
il y a environ 15 ans. "J'ai exposé mon
idée dans Nature, mais à ce moment il
n'y avait pas une forte conscience du problème
du réchauffement global et il n'y a donc pas
eu de réaction importante" déclare-t-il.
Mais plus récemment, l'idée de serre est
devenue un sujet de conversation dans les soirées
et soudainement tout le monde est intéressé
par les moyens d'empêcher la terre de se transformer
en sauna. Avec ses collègues, Latham a ressuscité
l'idée et cette fois ci les gens commencent à
la considérer sérieusement.
Les nuages ont différentes couleurs, formes
et tailles et se situent à des altitudes variées;
n'importe quel nuage ne convient pas. Une augmentation
des nuages hauts, légers, les cirrus, auraient
en fait l'effet opposé, rendant la terre plus
chaude parce qu'ils piègent plus de chaleur.
Il s'avère que les nuages bas, gris et grumeleux,
connus sous le nom de stratocumulus, sont les meilleurs
pour ce travail, renvoyant la lumière solaire
dans l'espace grâce à leur sommet brillant
et réfléchissant. Ce qui est très
bien, mais comment rendre les stratocumulus plus réfléchissants?
Stephen Salter, l'ingénieur innovateur de l'Université
d'Edinbourg (plus connu pour son invention, le canard
de Salter, la boite métallique flottante de 300
tonnes conçue pour actionner un générateur
par le mouvement d'agitation des vagues) pense qu'il
a la clé. "Nous avons besoin d'atomiser
de l'eau de mer et d'envoyer de minuscules gouttelettes
dans l'air" dit il. L'idée est que cette
fine brume s'évapore, laissant de minuscules
particules de sel de mer qui sont aspirées dans
les stratocumulus marins par les courants ascendants.
Ces petites particules agissent comme centre de formation
de gouttelettes supplémentaires. "Les nuages
deviennent plus réfléchissants si vous
augmentez leur nombre de gouttelettes" explique
Latham. Un avantage de remplir les nuages avec des gouttelettes
plus petites est qu'ils tendent à durer plus
longtemps, réfléchissant plus de lumière
dans l'espace avant qu'ils se dispersent.
Pour produire la fine brume d'eau de mer pulvérisée
artificiellement, Salter envisage des milliers de yachts
télécommandés zigzaguant sur les
mers, transportant l'équipement pour faire des
vagues très agitées, connues sous le nom
de vagues de Faraday. Un générateur ultrasonique
à haute fréquence ferait tournoyer l'eau
de mer à l'intérieur d'un tambour rainuré,
produisant de minuscules vagues plus fines qu'un cheveu.
"Ça ressemble un peu à une tasse
à café sur un train vibrant, mais ça
serait presque vertical" dit Salter. Une fois que
ces vagues sont suffisamment fortes, les gouttes d'eau
sont projetées de leur crête. "Tout
ce que nous avons à faire est de mettre ces fines
gouttelettes dans les premiers mètres d'air,
et la météorologie fera le reste"
dit Latham.
Pour protéger l'environnement, les yachts seraient
poussés par le vent agissant sur les tambours
tournants, comme une voile. Le mouvement du bateau sur
l'eau actionnerait des hélices agissant comme
des turbines, pour produire l'électricité
pour faire tourner les tambours et alimenter les générateurs
ultrasoniques. Pendant ce temps, des satellites dirigeraient
leurs mouvements, plaçant les yachts dans les
zones de l'océan où les stratocumulus
les plus efficaces pourraient être modifiés.
Mais est ce que ça fonctionnerait vraiment?
Si l'on en croit les calculs et les modèles informatiques,
alors oui, la physique de l'idée est bonne. Travaillant
avec Tom Choularton de l'Université de Manchester,
et Mike Smith, de l'Université de Leeds, Latham
a effectué des calculs approfondis pour être
sur de ses comptes. De plus, ils ont testé l'idée
en utilisant le modèle climatique global du Bureau
Météorologique et montré que l'augmentation
du nombre de gouttelettes dans les stratocumulus marins
pourrait avoir un effet significatif. "Modifier
une zone couvrant environ 3% de la surface terrestre
a produit un effet de refroidissement qui équilibre
plus ou moins le réchauffement dû au doublement
des niveaux de dioxyde de carbone" dit Latham.
Maintenant, les scientifiques cherchent des fonds pour
passer au stade suivant, tester l'idée avec un
projet pilote à faible échelle au-dessus
des océans, en utilisant des stratocumulus naturels.
S'ils trouvaient que la brillance supplémentaire
des nuages fait le travail et qu'il n'y a pas d'effets
adverses sur la pluviomètrie sur les terres,
alors l'idée originale de Latham pourrait commencer
à avoir un sens. Néanmoins, tous les scientifiques
soulignent qu'augmenter la réflectivité
des nuages n'est pas une solution à long terme
pour le réchauffement global., mais une mesure
provisoire. "Nos tentatives tendent vers l'achat
de temps" dit Latham. Quand on voit les récents
rapports de la fonte de la calotte glaciaire antarctique,
nous pourrions avoir besoin d'acheter du temps très
rapidement.
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