Cet article a été soumis à l'Académie
Nationale d'Ingénierie, Washington DC, 23-24
avril 2002
Ministère de l'Énergie - Lawrence
Livermore National Laboratory
Stabilisation active du climat: propositions applicables
basées sur la physique pour la prévention
du changement de climat
Edward Teller, Roderick Hyde et Lowell Wood
Institution Hoover, Université de Stanford et
Université de Californie Lawrence Livermore National
Laboratory |
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Nous proposons des arguments pour la gestion
technique active du forçage radiatif de la température
de l'enveloppe de la terre, plutôt que
la gestion administrative des apports atmosphériques
de gaz à effet de serre, afin de stabiliser à
la fois le climat global et temporel et ses caractéristiques
à l'échelle meso. Nous suggérons
que la gestion active du forçage radiatif implique
des coûts économiques et des impacts environnementaux
négligeables, probablement fortement négatifs,
et ainsi se conforme
le mieux avec le mandat de la Convention sur le Changement
de Climat des Nations-Unies. Nous proposons que
de telles approches soient rapidement évaluées
à échelle réduite au cours d'un
programme international intensif.
On ne réalise généralement pas
que le climat saisonnier moyen de la terre est plus
froid actuellement qu'il l'a été 99% du
temps depuis que la vie complexe est apparue avec l'explosion
du Cambrien il y a 545 millions d'années. De
la même façon, on ne se rend pas compte
que les concentrations atmosphériques de dioxyde
de carbone - CO2 - sont seulement très vaguement
en corrélation avec les conditions climatiques
moyennes tout au long de cette période géologique,
il a fait beaucoup plus froid avec des concentrations
en CO2 substantiellement plus élevées
et aussi plus chaud avec des niveaux de CO2 plus faibles
qu'à présent; en fait le niveau de CO2
dans l'air est observé dans les enregistrements
géologiques comme un des facteurs les moins déterminants
pour la température moyenne saisonnière
et globale.
Si, après considération attentive de
ces faits, on souhaite maintenir le climat global à
ses niveaux actuels de température - ou à
une valeur légèrement supérieure
caractérisant l'Holocène il y a plusieurs
milliers d'années, ou à cette valeur plus
faible du Petit Âge Glaciaire d'il y a 3 siècles,
ou à n'importe quel autre niveau raisonnable
- alors des modifications actives des propriétés
radiatives de la terre - gestion active du forçage
radiatif des températures de l'atmosphère
et des océans de la terre par le soleil - est
une tactique évidente. C'est en fait probablement
la voie la plus pratique
pour ce problème particulier.
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Il est approprié de noter dès le départ
que les concepts de base pour la modification volontaire
des propriétés radiatives de la terre
n'émanent pas de nous; ils ont été
proposés au moins depuis
1979 par Dyson et Marland dans le contexte du
réchauffement global entraîné par
le CO2, et peut être de façon plus évidente
par le groupe d'étude sur le changement global
de l'Académie Nationale des Sciences en 1992
et par les découvertes similaires des études
suivantes par le Groupe de Travail Intergouvernemental
en 1995, qui ont noté ostensiblement ce qui leur
est apparu de façon surprenante comme très
pratique. Ce que nous avons fait dans nos recherches,
basées sur l'article 3.5 de la Convention des
Nations-Unies, est simplement d'optimiser la quantité
et le coût des projets précédents
et en proposer certains nouveaux, en portant une certaine
attention sur comment des études à court
terme de tels projets optimisés pouvant assurer
la stabilité climatique pourraient commencer.
Si la préférence est d'éparpiller
la lumière solaire dans l'espace, ou que la terre
rayonne thermiquement plus de puissance nette, la surface
caractéristique impliquée pour changer
l'apport solaire net d'une moyenne spatiale et temporelle
de 4 Watt/m2 est ~10 puissance -2 Aproj, ~1.3 x 10 puissance
16 cm2, ~1.3 millions de km2, où Aproj est la
surface que la terre projette sur le plan perpendiculaire
à l'axe terre-soleil; si un changement devait
être imposé uniformément sur la
terre entière, il devrait être 4 fois cette
taille (c'est à dire le rapport de la surface
de la terre sur celle de son disque).
Le contrôle du budget radiatif aux échelles
qui nous intéressent se concentre donc sur la
génération et le maintient de la couverture
de cette fraction de 1-2% de la surface terrestre -
ou, alternativement, de son disque présenté
au soleil - avec un ou des matériaux qui modifient
substantiellement la propagation soit de la lumière
solaire reçue (insolation), soit de la radiation
thermique émise sur ou près de la surface
de la terre sur cette zone. Si la lumière solaire
est bloquée mais la radiation thermique terrestre
de longueur d'onde environ 20% supérieure est
autorisée à s'échapper dans l'espace,
alors la terre se refroidira de la quantité désirée
- au niveau spatial et temporel; inversement, si la
lumière solaire est autorisée à
passer jusqu'à la surface de la terre, mais que
la radiation thermique terrestre est empêchée
de s'échapper dans l'espace, alors la terre se
réchauffera de la même quantité
- encore au niveau spatial et temporel.
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Il est approprié d'indiquer les très importants
résultats de Govindasamy et Caldeira qui ont
montré que la suppression d'une telle fraction
de l'insolation uniformément au-dessus de la
surface entière de la terre ne résulte
pas seulement dans des changements de température
de la quantité prédite - au niveau spatial
et temporel, mais préserve également le
climat actuel dans ses détails saisonniers et
géographiques, au moins jusqu'aux échelles
meso dans l'espace et dans le temps qui sont traités
plus ou moins bien par les modèles de circulation
globaux actuels. Ces résultats les plus remarquables
- qui sont, contrairement aux hypothèses précédentes,
non supportées par la modélisation, mais
qui ont été confirmés par des travaux
ultérieurs - indiquent que le
climat terrestre peut être stabilisé par
l'addition ou la soustraction de l'insolation
en accord avec ce que nous proposons, pas seulement
en général mais également dans
les détails spatiaux et temporels considérables
pour monsieur tout le monde qui ressent la haute fréquence
des composantes du climat comme la météo
journalière dans son micro-climat.
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Une "couverture" de l'ordre d'un million de
km2 de la surface de la terre au moyen de quelque chose
qui affecte substantiellement la lumière solaire
qui l'atteint - ou sa re-radiation thermique - pourrait
apparaître comme une tâche plutôt
ambitieuse. Cependant, puisque la matière peut
interagir assez fortement avec les radiations, si sa
composition et sa géométrie sont choisies
de façon appropriée, le principal défi
n'est pas la préparation ou la manipulation de
la quantité de matériau impliquée
dans cette "couverture" mais plutôt
de s'assurer qu'il reste utilement en place pendant
une longue période ("l'épaisseur"
moyenne du matériau d'éparpillement au-dessus
de ces 10 puissance 6 (1 million) de km2 est au plus
de 10 puissance -4 cm (1 micron), le volume total est
donc de de l'ordre de 10 puissance 12 cm3 - un cube
de 100 mètres de côté - et la masse
correspondante est 'seulement' de l'ordre d'1 million
de tonnes). Comme exemple spécifique et en aperçu
d'un de nos résultats, la préoccupation
actuelle au sujet du réchauffement global se
concentre sur l'apport d'environ 7 milliards de tonnes
de carbone dans l'atmosphère chaque année
et plusieurs fois cette quantité d'ici plusieurs
décennies; le déploiement annuel d'à
peine 0.01% cette masse de soufre - grossièrement
1/10000 de la quantité de soufre par rapport
au carbone - dans la forme et aux endroits appropriés
peut être effectué pour compenser entièrement
"l'effet des gaz à effet de serre"
de la masse 10000 fois plus grande de CO2 apporté.
Le positionnement d'éparpilleurs de radiations
solaires dans l'atmosphère supérieure
de la terre - spécifiquement, la moyenne et haute
atmosphère - est une approche maintenant vénérable
qui semble fournir le déploiement le plus réalisable,
comme la durée de vie opérationnelle de
tels éparpilleurs peut être aussi longue
qu'1/2 décennie; les taux de remplacement nécessaires
sont donc modestes. Ainsi, la
stratosphère est l'endroit où nous envisageons
de déployer tout le système d'éparpillement
pour la modulation de l'insolation que nous proposons
pour des études à court terme.
La formation et le placement d'aérosols de sulfate
est le plus coûteux moyen en terme de quantité
- bien que raisonnablement économique - d'éparpiller
dans l'espace la fraction de lumière solaire
nécessaire pour compenser les effets prédits
de la concentration atmosphérique de CO2 en l'an
2100. De façon intéressante, un tel éparpillement
Rayleigh de la lumière solaire, accompli par
des aérosols déployés dans la stratosphère
dont le diamètre est plusieurs fois plus petit
que la longueur d'onde de la lumière, éparpillera
sélectivement dans l'espace les composantes ultraviolettes
fortement nuisibles tout en diminuant la lumière
que nous voyons - et que les plantes utilisent pour
la photo synthèse - seulement imperceptiblement.
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Du point de vue humain, le ciel serait plus bleu, les
couchers de soleil plus
spectaculaires, les plantes seraient moins stressées
par les dommages dus aux UV et seraient donc plus productives,
et les enfants jouant à l'extérieur seraient
moins susceptibles d'attraper des coups de soleil (et
donc moins susceptibles aux dysplasies et aux cancers
de la peau étant adultes), si ce système
d'éparpillement Rayleigh stratosphérique
était déployé. Nous avons estimé
les coûts d'établissement d'une telle gestion
active du forçage radiatif sur une échelle
allant jusqu'en 2100 à environ 1 milliard de
dollars par an, et personne à notre connaissance
n'a contredit ces estimations depuis que nous les avons
proposé il y a une demi décennie. En fait,
l'étude de l'Académie Nationale a implicitement
reconnu la faisabilité de ce genre de démarche,
bien qu'elle n'ait considéré seulement
minutieusement que l'éparpillement par des aérosols
diélectriques non optimisés. De même,
de tels coûts semblent être d'un ordre de
magnitude inférieur aux économies des
frais de santé dus aux dommages de la peau occasionnés
par le soleil - et bien moindres que la productivité
de l'agriculture due à l'évitement des
dommages causés par les UV - rien qu'aux États-Unis;
ainsi, le coût pour le contribuable américain
d'implémenter ce système bénéficiant
à toute l'humanité semble être bien
négatif: ses bénéfices économiques
l'emporteraient largement sur son coût.
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Le déploiement d'un ou plusieurs écrans
métalliques d'éparpillement si
diaphanes qu'ils seront pratiquement invisibles pour
l'oeil humain juste à l'intérieur du point
de Lagrange du système terre-soleil et sur son
axe représente l'optimal
absolu de tous les moyens que nous connaissons pour
assurer la stabilité du climat à long
terme, et est plutôt original.
Considérant les fait précédents,
alors, si vous êtes inclinés à souscrire
aux directives de la Convention de Rio qui stipule que
la réduction du réchauffement global doit
être effectuée de la manière "la
moins coûteuse" - que vous croyiez ou non
que la terre se réchauffe significativement au-dessus
et au-dela des valeurs naturelles, que vous croyiez
ou non que les activités humaines sont largement
responsables d'un tel réchauffement et que vous
croyiez ou non que des problèmes susceptibles
d'avoir un impact significatif seulement dans un siècle
devraient être abordés par des moyens technologiques
actuels plutôt qu'être reportés pour
éviter l'emploi de moyens plus avancés
- vous préférerez nécessairement
la gestion technique active du forçage radiatif
de la terre à la gestion administrative de l'apport
des gaz à effet de serre dans l'atmosphère,
pour les raisons pratiques citées précédemment.
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La gestion technique du forçage radiatif de l'enveloppe
de la terre, non la gestion administrative des apports
gazeux dans l'atmosphère, est la
voie autorisée par les clauses pertinentes de
la Convention sur le Changement de Climat des Nations-Unies.
De plus, cela semble être vrai dans une large
marge économique, qui pourrait être de
pas moins d'1 trillion de dollars par an au niveau mondial,
comme cela permet la fertilisation des cultures de la
planète grâce à une plus grande
concentration de CO2, sans regrets au sujet du climat.
Un des problèmes les plus urgents auquel fait
face la race humaine au 21° siècle - comment
nourrir de façon adéquate les 60% de personnes
supplémentaires prévus d'ici un siècle
- commence ainsi à être distinctement raisonnable.
Notez dans la figure 2 que les zones bénéficiant
des gains de productivité les plus élevés
coïncident avec les zones de la planète
dans lesquelles les gains de population les plus grands
sont prévus de se produire. Avec la gestion active
du forçage radiatif de l'atmosphère et
des océans, l'humanité pourrait être
capable, en "fertilisant
avec l'air", de surmonter le défi
de la production de nourriture pour le 21° siècle,
tout comme l'utilisation intensive de fertilisants des
sols ont apporté à l'humanité un
délai de grâce de plusieurs décennies
dans la production de nourriture dans la dernière
moitié du 20° siècle.
Nous suggérons donc que le gouvernement US ferait
bien de lancer immédiatement un programme intensif
pour s'occuper de tous ces problèmes essentiels
dans la gestion technique active du forçage radiatif,
y compris des expériences bien conçues
à échelle réduite dans l'atmosphère.
À cause des impacts globaux évidents
de n'importe quel système de gestion de quelque
sorte que ce soit, la plus grande participation internationale
faisable dans ce programme devrait être incitée. |