Par Steve Connor, rédacteur scientifique -
31 juillet 2006
Un scientifique détenteur d'un prix Nobel a
établi un plan d'urgence pour sauver le monde
du réchauffement global, en altérant la
composition chimique de l'atmosphère terrestre
supérieure. Le professeur Paul Crutzen, qui a
obtenu un prix Nobel en 1995 pour ses travaux sur le
trou dans la couche d'ozone, croit que les tentatives
politiques pour limiter les gaz à effet de serre
d'origine humaine sont si pitoyables qu'un plan imprévu
radical est nécessaire.
Dans un mémoire scientifique sujet à
polémique devant être publié dans
le numéro d'août du journal Climate Change
(Changement Climatique), il déclare qu'une "porte
de secours" est nécessaire si le réchauffement
global commence à devenir incontrôlable.
Le professeur Crutzen a proposé une méthode
pour refroidir artificiellement le climat global en
relâchant des particules de soufre dans l'atmosphère
supérieure, ce qui réfléchirait
les rayons solaires et la chaleur vers l'espace. La
proposition controversée est prise au sérieux
par les scientifiques parce que le professeur Crutzen
a une expérience reconnue dans la recherche atmosphérique.
Une flotte de ballons à haute altitude pourrait
être utilisée pour éparpiller le
soufre en hauteur, ou il pourrait même être
envoyé dans l'atmosphère en utilisant
de gros obus d'artillerie, dit le professeur Crutzen,
un chercheur de l'Institut de Chimie Max Planck en Allemagne.
L'effet des particules de soufre éparpillées
dans l'atmosphère serait d'augmenter la réflectivité,
ou albédo, de la terre, ce qui causerait un effet
de refroidissement général.
Une telle "géoingénierie" du
climat a été suggérée auparavant,
mais le professeur Crutzen va beaucoup plus loin en
définissant un modèle détaillé
sur la façon dont cela pourrait être fait,
l'échelle de temps impliquée et le coût.
Dans son article scientifique à paraître,
le professeur Crutzen souligne que le meilleur moyen
d'éviter un désastre climatique général
est que les pays réduisent significativement
leurs émissions de gaz à effet de serre,
particulièrement le dioxyde de carbone produit
par la combustion du pétrole, du gaz et du charbon.
Mais en l'absence de telles mesures, et avec l'augmentation
attendue des températures moyennes globales de
3°C durant ce siècle, il pourrait bientôt
y avoir un moment où des mesures plus extrêmes
devront être considérées, dit il.
"Si des réductions importantes des émissions
de gaz à effet de serre ne se produisent pas
et si les températures augmentent rapidement,
alors l'ingénierie du climat présentée
ici est la seule option disponible pour réduire
rapidement les températures et contrer les autres
effets climatiques", dit le professeur Crutzen.
"Une telle modification pourrait aussi être
arrêtée rapidement, si des effets annexes
indésirables et imprévus devenaient apparents,
ce qui permettrait à l'atmosphère de retourner
à son état antérieur en quelques
années", dit il.
Une telle idée est si controversée que
plusieurs scientifiques se sont opposés à
sa publication dans la presse scientifique vérifiée
par leurs collègues, craignant qu'elle puisse
encourager la vision qu'il est plus facile de traiter
les symptômes plutôt que les causes du changement
de climat.
Cependant, le professeur Crutzen soutient que la réponse
politique internationale "extrêmement décevante"
à la nécessité de réduire
les émissions de gaz à effet de serre
signifie qu'il ne devrait plus être considéré
comme tabou de penser à la géoingénierie
du climat.
"Il est important de dire que cette possibilité
ne devrait pas être utilisée pour justifier
une politique climatique inadéquate, mais simplement
pour créer une possibilité de combattre
un réchauffement climatique potentiellement drastique",
dit il. "Le mieux serait que les émissions
de gaz à effet de serre soient réduites.
Actuellement ça ressemble à un vœu
pieux."
Son projet est partiellement modélisé
sur l'éruption volcanique du Mont Pinatubo de
1991, quand des milliers de tonnes de soufre ont été
éjectées dans l'atmosphère causant
la chute des températures globales.
Le Mont Pinatubo a généré des
aérosols de soufre dans l'atmosphère qui
ont refroidit la terre de 0.5°C en moyenne l'année
suivante. Les particules de soufre ont agi comme de
minuscules miroirs, empêchant une fraction de
la lumière solaire d'atteindre le sol.
Le professeur Crutzen a calculé qu'une quantité
relativement faible de soufre pourrait causer un refroidissement
similaire s'il était relâché à
une altitude assez haute dans la stratosphère,
plutôt qu'à l'altitude plus faible de la
troposphère. Des ballons météorologiques
ou même des obus pourraient être utilisés
pour transporter le soufre.
"Bien que le refroidissement par des aérosols
de soufre se produise aussi dans la troposphère,
le gros avantage de placer des particules réfléchissantes
dans la stratosphère est leur long temps de séjour
d'environ un à deux ans, comparé à
une semaine dans la troposphère", dit le
professeur Crutzen
"Il pourrait être possible de fabriquer
un gaz spécial qui soit seulement transformé
chimiquement dans la stratosphère pour produire
du soufre", dit il. Un tel composé devrait
être non toxique, insoluble dans l'eau, non réactif,
et avoir une demi-durée de vie relativement courte
d'environ dix ans.
Ceci coûterait entre 25 et 50 milliards de dollars
- ou environ 25 à 50 dollars par personne dans
les pays développés - pour placer suffisamment
de soufre pour jusqu'à deux ans.
Mais ce coût élevé devrait être
comparé à celui beaucoup plus important
des désastres environnementaux, tels que l'inondation
des zones côtières causée par le
réchauffement global, dit il.
Les effets colatéraux pourraient être
une destruction supplémentaire de la couche d'ozone
et un blanchissement du ciel, bien que les particules
rendraient les lever et coucher de soleil plus spectaculaires,
dit il.
Autres idées de géoingénierie
-Miroirs réfléchissants:
La réflectivité naturelle de la terre,
ou albédo, renvoie environ trente pourcents de
la lumière solaire dans l'espace. Augmenter l'albédo
pourrait être fait en construisant des miroirs
géants déployés dans l'espace,
en étendant des films réfléchissants
dans les déserts, ou en faisant flotter des îles
de plastique blanc sur les océans pour imiter
l'effet de réflexion de la mer gelée.
-Faire disparaître le CO2:
Le plancton marin absorbe le dioxyde de carbone de l'atmosphère,
dont les microbes ont besoin pour la photosynthèse.
La croissance du plancton est limitée par les
quantités relativement faibles de fer dans les
océans. Des scientifiques ont procédé
à des expériences sur la stimulation du
plancton en jetant de la limaille de fer dans la mer. |